mercredi 17 juin 2009

Les raisons du succès des écologistes aux européennes ?

Ce fut une petite surprise pour certains — d'autres s'y attendaient franchement — que de découvrir les écologistes comme troisième voir deuxième force politique du pays, lors de ces européennes. Examinons un peu plus attentivement ce fait, & proposons quelques pistes.

D'abord, il est intéressant de remarquer qu'il n'y avait pas, lors de ce dernier scrutin, une mais deux listes écologistes, à savoir Europe-Ecologie, la plus connue, menée par Daniel Cohn-Bendit — dans cette analyse, nous nous attarderons exclusivement sur celle-ci — & l'Alliance Ecologiste Indépendante, comptant parmi ses meneurs le chanteur Francis Lalanne. La division, est ici un signe flagrant : si les écologistes peuvent se permettre de présenter deux listes concurrentes, c'est donc que le parti majoritaire s'estime assez fort pour ne pas avoir besoin des votes de la liste dissidente. La conclusion naturel, c'est que la division découle du nombre. La surprise de ces élections est donc fortement atténuée. De plus, les sondages & reportages, montés en épingle, avaient tendance à monter le piéton Cohn-Bendit à l'assaut de la tour Bayrou, pour le plus grand profit de l'empire Sarkozy qui a profité de l'épuisement des belligérants pour s'assurer la maîtrise du champ de bataille — Napoléon n'aurait pas rêvé autre chose en matière militaire. Cette stratégie fut surtout visible grâce à la diffusion du film Home, pure propagande écologiste, à quelques jours des élections, sur une chaîne de télévision publique ; le second indice de la manœuvre fut la réaction médiatique au mouvementé débat entre les meneurs des listes écologiste & centriste. Ensuite, ne négligeons pas le fait qu'à de telles élections, c'est-à-dire pas des plus importantes, sur un plan immédiatement national & politique — au contraire des présidentielles — le report de voix sur les grand partis est moins important, & les électeurs ont tendances à laisser libre cours à leurs fantaisies.


Mais, d'une manière plus générale, qu'est-ce qui a pu provoquer un tel succès ? Votre humble & dévoué serviteur a une théorie, qu'il vous prie de le laisser dévoiler.

C'est le sujet même de l'écologie, à savoir l'écologisme qui est la cause. Bien sûr, cela ne paraît pas être un constat extraordinaire : si les gens votent pour des écologistes, c'est parce qu'ils parlent d'écologie. Cela frise le pléonasme. Mais cela veut dire qu'il n'y a finalement que l'écologie qui puisse produire un tel assentiment au sein de la population.

L'attrait de cette matière est le suivant : Tous les autres politiciens parlent de politique, à savoir comment gérer la cité, entre libéralisme économique & protectionnisme, entre libéralisme sociétal & conservatisme. Ce sont des sujets qui ont tendances à ennuyer tout un chacun. Qui n'a pas déjà été ennuyé par une conversation animée entre deux personnes, dont le sujet était un point politique précis ? Seuls les vrais passionnés de la res publica peuvent le nier — & c'est tout à leur honneur. Les autres préfèrent songer à des préoccupations plus légères. Bref, c'est la politique qui ennuie. Or la particularité de l'écologie, c'est que ce domaine c'est justement d'abord développé comme une préoccupation méta-politique. Ce fut d'abord comme une science que ce sujet a conquis les esprits. D'ailleurs, l'écologisme n'a commencé à investir le champ politique de manière incontournable que depuis une vingtaine d'années. Ainsi, l'écologie politique a ce principal avantage qu'elle ne paraît pas être sujet aux querelles partisanes et au fanatisme qui peut habiter parfois le spectre politique traditionnel. D'ailleurs, son essence est apartisane, apolitique même, puisque elle peut être saisie par tout un chacun, sans vraiment discriminer la droite ou la gauche. Et les politiques ne se privent pas de s'en emparer pour émailler leurs programmes. L'écologisme, défini en une phrase c'est la politique pour ceux qui ne veulent pas de celle-ci. C'est par conséquent naturellement que l'écologisme paraît doté de qualités que ne peut, intrinsèquement, pas avoir la politique : la probité, par exemple, opposer à la corruption qui semblerait habiter tout participant de droite ou de gauche.

Cependant, il ne faut pas se leurrer. Le monde, & la France en particulier, ne semblent pas disposer de marins prêts à attacher ses chefs — la population déclarée souveraine — au mât du navire pour ne pas qu'ils succombent au chant des sirènes. Le scepticisme qui devrait, en politique, être le premier sentiment des gens à l'encontre de tous ceux qui proclament agir pour le bien de tous — c'est-à-dire tout le monde — a l'air d'être encore plus absent à l'endroit de l'écologisme. Or, ce mouvement est des plus dangereux. En effet, sa conception même est englobante & exploite à son paroxysme le syndrome de l'effet papillon, en proclamant que, ce que l'américain fait chez lui — consommer beaucoup d'essence dans son gros 4x4 urbain*, a un impact direct sur le pygmée d'une région oubliée de l'Afrique ou l'ours polaire et sa banquise. Donc, par essence, l'écologisme — ou environnementalisme — a vocation à régir le monde entier, sans qu'un territoire ne lui échappe. C'est d'ailleurs la logique des accords de Kyoto, d'où la rage des écologistes qui condamnent par principe la non-ratification américaine. Ensuite, l'écologisme a aussi pour but de régir toute la vie des personnes qui y sont soumises. Il ne s'agit donc plus de simplement se préoccuper de la vie publique, mais bien aussi de la vie privée des gens : leur manière de manger, de s'occuper, de travailler, de se laver, et même de déféquer. Ce dernier domaine est bien ironique, mais dénote du niveau d'imprégnation de l'écolgisme dans la vie quotidienne. Même les deux grands totalitarismes du XXème siècle ne pouvaient se targuer d'un tel résultat**. Enfin, l'écologisme ne tolère aucune contestation : le pauvre M. Allègre est bien le seul, médiatiquement parlant, dans le paysage français, à défendre — vaillamment — la cause du scepticisme. Il subit d'ailleurs pour cela l'opprobre de la classe politique.

Les plus optimistes pourront arguer que tout cela ne sont que les indices d'une pensée holiste. Vous permettrez, chers lecteurs, que le contributeur de ce blog soit plus circonspect et qualifie de manière plus simple l'environnementalisme de totalitarismes : il ne lui manque que la réalisation de la singularité politique pour être au même niveau que l'URSS d'après-guerre...

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* Il s'agit à dessein d'un cliché.

** Un allemand, ami de famille & qui avait fait le front de l'est par obligation, avait coutume de dire que même Hitler avait échoué à leur imposer les sous-vêtements Feldgrau, et que cependant, sur ce plan là, l'entreprise de VPC d'articles de chasse Kettner avait franchement réussi.

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