jeudi 25 juin 2009

La fausse question du prince, la vrai question des principes

Les gens dits normaux ont coutume de poser aux royalistes, parmi les premières questions, celle du prince. « Mais alors, qui mettriez-vous sur le trône ? » est une sempiternelle interrogation & tout militant, tout royaliste de combat doit être en mesure d'y répondre. Certains dans une attitude très partisane opteront directement pour leur prétendant, en ne parlant pas du tout de l'autre ou en le vouant à tous les diables. D'autres, du moins je l'espère, auront une attitude plus œcuménique & se lanceront soit dans un exposé détaillé des querelles dynastiques — Bourbons, Orléans, Naundorff, etc. — soit dans une démonstration de l'inutilité actuelle d'un tel débat. C'est ce dernier point qui sera l'objet du présent billet.
Fondamentalement, que changerait, en terme de gouvernance, le choix de l'un ou l'autre prétendant — pour les besoins de la démonstration, les courants marginaux seront évacués comme partie congrue — ? Pas grand chose, à par un fort accent ibérique pour l'un. En effet, l'idée du roy est mêmement défendue dans les deux camps, le projet politique, si tant est qu'il y en ait seulement l'esquisse de l'ébauche au sein des deux instituts — IMB & IMF — étant celui d'un véritable arbitre au dessus des partis, intervenant donc rarement dans la politique quotidienne dévolue au gouvernement, & dans ces cas toujours avec le poids de son symbole. Seuls quelques domaines, justement appelés régaliens, subiraient son examen plus approfondi. S'ajouteraient à cela quelques joyeusetés spécifiques : la défense de la tradition française ou catholique, la commémoration des grandes dates de l'ancien & du nouveau régime, l'inauguration des chrysanthèmes.
Peut-on seulement arguer d'une différence politique fondamentale entre les princes ? Sans doute pas : l'un, qui donne régulièrement son avis, garde une position très classiquement royaliste — tous les thèmes chers au mouvements sont repris, sans originalité — tandis que l'autre fait clairement rédiger ses discours par son secrétariat — donc sans surprise non plus.
Bref, il faut trouver autre part les raisons d'un tel tiraillement.

Celles-ci pourraient peut-être se trouver dans les principes prônés par les deux camps. Ceux-ci divergent en quelque sorte par leurs priorités. Les Orléans subissent, sans doute à leur insu, l'héritage maurrassien qui donne à ce courant, & donc au discours de ses princes, une légère patine réactionnaire, d'essence nationaliste. Pour résumer très fortement les maurrassiens sont royalistes parce que nationalistes.
Du côté des bourbons par contre, c'est plutôt la défense de la tradition — dans son aspect tant civil que religieux — qui est à l'honneur. C'est d'ailleurs sans doute pour cela que le discours catholique y est plus présent.
Voilà donc tout ce en quoi consiste une lutte qui remonte à plus d'une centaine d'année. Bien sûr, on pourra toujours rétorquer que c'est une question de principe, qu'on a pas à choisir son roy, que c'est untel qui est légitime, etc. Mais qu'est-ce que ces querelles enfantines apporteraient au peuple, si celui-ci a un jour l'occasion de se voir mener par un prince ? Cela fait-il une différence, pour l'employé moyen, que l'un soit Bourbon, et l'autre Orléans ? Il n'y verra vraiment aucun intérêt et aura raison. Le comte de Chambord résumait il y a déjà plus d'un siècle cette absurdité très française dans son développement : « Ma personne n'est rien, mon principe est tout ». A l'heure actuelle, il n'est pas utile de se battre pour l'un ou l'autre des princes. Leur projet politique est similaire, leur poids équivalent, leurs chances identiques. Si le choix du roy devait se faire entre un très réactionnaire & un très libéral, effectivement, la question se poserait légitimement, du choix de société subséquent. Mais, cela n'étant pas le cas pour l'instant, il est franchement inutile de continuer à dépenser autant de forces dans une lutte fratricide et in fine fatale.

mercredi 17 juin 2009

Les raisons du succès des écologistes aux européennes ?

Ce fut une petite surprise pour certains — d'autres s'y attendaient franchement — que de découvrir les écologistes comme troisième voir deuxième force politique du pays, lors de ces européennes. Examinons un peu plus attentivement ce fait, & proposons quelques pistes.

D'abord, il est intéressant de remarquer qu'il n'y avait pas, lors de ce dernier scrutin, une mais deux listes écologistes, à savoir Europe-Ecologie, la plus connue, menée par Daniel Cohn-Bendit — dans cette analyse, nous nous attarderons exclusivement sur celle-ci — & l'Alliance Ecologiste Indépendante, comptant parmi ses meneurs le chanteur Francis Lalanne. La division, est ici un signe flagrant : si les écologistes peuvent se permettre de présenter deux listes concurrentes, c'est donc que le parti majoritaire s'estime assez fort pour ne pas avoir besoin des votes de la liste dissidente. La conclusion naturel, c'est que la division découle du nombre. La surprise de ces élections est donc fortement atténuée. De plus, les sondages & reportages, montés en épingle, avaient tendance à monter le piéton Cohn-Bendit à l'assaut de la tour Bayrou, pour le plus grand profit de l'empire Sarkozy qui a profité de l'épuisement des belligérants pour s'assurer la maîtrise du champ de bataille — Napoléon n'aurait pas rêvé autre chose en matière militaire. Cette stratégie fut surtout visible grâce à la diffusion du film Home, pure propagande écologiste, à quelques jours des élections, sur une chaîne de télévision publique ; le second indice de la manœuvre fut la réaction médiatique au mouvementé débat entre les meneurs des listes écologiste & centriste. Ensuite, ne négligeons pas le fait qu'à de telles élections, c'est-à-dire pas des plus importantes, sur un plan immédiatement national & politique — au contraire des présidentielles — le report de voix sur les grand partis est moins important, & les électeurs ont tendances à laisser libre cours à leurs fantaisies.


Mais, d'une manière plus générale, qu'est-ce qui a pu provoquer un tel succès ? Votre humble & dévoué serviteur a une théorie, qu'il vous prie de le laisser dévoiler.

C'est le sujet même de l'écologie, à savoir l'écologisme qui est la cause. Bien sûr, cela ne paraît pas être un constat extraordinaire : si les gens votent pour des écologistes, c'est parce qu'ils parlent d'écologie. Cela frise le pléonasme. Mais cela veut dire qu'il n'y a finalement que l'écologie qui puisse produire un tel assentiment au sein de la population.

L'attrait de cette matière est le suivant : Tous les autres politiciens parlent de politique, à savoir comment gérer la cité, entre libéralisme économique & protectionnisme, entre libéralisme sociétal & conservatisme. Ce sont des sujets qui ont tendances à ennuyer tout un chacun. Qui n'a pas déjà été ennuyé par une conversation animée entre deux personnes, dont le sujet était un point politique précis ? Seuls les vrais passionnés de la res publica peuvent le nier — & c'est tout à leur honneur. Les autres préfèrent songer à des préoccupations plus légères. Bref, c'est la politique qui ennuie. Or la particularité de l'écologie, c'est que ce domaine c'est justement d'abord développé comme une préoccupation méta-politique. Ce fut d'abord comme une science que ce sujet a conquis les esprits. D'ailleurs, l'écologisme n'a commencé à investir le champ politique de manière incontournable que depuis une vingtaine d'années. Ainsi, l'écologie politique a ce principal avantage qu'elle ne paraît pas être sujet aux querelles partisanes et au fanatisme qui peut habiter parfois le spectre politique traditionnel. D'ailleurs, son essence est apartisane, apolitique même, puisque elle peut être saisie par tout un chacun, sans vraiment discriminer la droite ou la gauche. Et les politiques ne se privent pas de s'en emparer pour émailler leurs programmes. L'écologisme, défini en une phrase c'est la politique pour ceux qui ne veulent pas de celle-ci. C'est par conséquent naturellement que l'écologisme paraît doté de qualités que ne peut, intrinsèquement, pas avoir la politique : la probité, par exemple, opposer à la corruption qui semblerait habiter tout participant de droite ou de gauche.

Cependant, il ne faut pas se leurrer. Le monde, & la France en particulier, ne semblent pas disposer de marins prêts à attacher ses chefs — la population déclarée souveraine — au mât du navire pour ne pas qu'ils succombent au chant des sirènes. Le scepticisme qui devrait, en politique, être le premier sentiment des gens à l'encontre de tous ceux qui proclament agir pour le bien de tous — c'est-à-dire tout le monde — a l'air d'être encore plus absent à l'endroit de l'écologisme. Or, ce mouvement est des plus dangereux. En effet, sa conception même est englobante & exploite à son paroxysme le syndrome de l'effet papillon, en proclamant que, ce que l'américain fait chez lui — consommer beaucoup d'essence dans son gros 4x4 urbain*, a un impact direct sur le pygmée d'une région oubliée de l'Afrique ou l'ours polaire et sa banquise. Donc, par essence, l'écologisme — ou environnementalisme — a vocation à régir le monde entier, sans qu'un territoire ne lui échappe. C'est d'ailleurs la logique des accords de Kyoto, d'où la rage des écologistes qui condamnent par principe la non-ratification américaine. Ensuite, l'écologisme a aussi pour but de régir toute la vie des personnes qui y sont soumises. Il ne s'agit donc plus de simplement se préoccuper de la vie publique, mais bien aussi de la vie privée des gens : leur manière de manger, de s'occuper, de travailler, de se laver, et même de déféquer. Ce dernier domaine est bien ironique, mais dénote du niveau d'imprégnation de l'écolgisme dans la vie quotidienne. Même les deux grands totalitarismes du XXème siècle ne pouvaient se targuer d'un tel résultat**. Enfin, l'écologisme ne tolère aucune contestation : le pauvre M. Allègre est bien le seul, médiatiquement parlant, dans le paysage français, à défendre — vaillamment — la cause du scepticisme. Il subit d'ailleurs pour cela l'opprobre de la classe politique.

Les plus optimistes pourront arguer que tout cela ne sont que les indices d'une pensée holiste. Vous permettrez, chers lecteurs, que le contributeur de ce blog soit plus circonspect et qualifie de manière plus simple l'environnementalisme de totalitarismes : il ne lui manque que la réalisation de la singularité politique pour être au même niveau que l'URSS d'après-guerre...

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* Il s'agit à dessein d'un cliché.

** Un allemand, ami de famille & qui avait fait le front de l'est par obligation, avait coutume de dire que même Hitler avait échoué à leur imposer les sous-vêtements Feldgrau, et que cependant, sur ce plan là, l'entreprise de VPC d'articles de chasse Kettner avait franchement réussi.

mardi 9 juin 2009

L'Alliance Royale aux européennes : le bilan

Les résultats définitifs des élections européennes ont été publiés hier. Il est désormais temps de faire le point sur les résultats de la seule formation royaliste en lice, l'Alliance Royale. Les résultats de ce parti n'ayant pas les honneurs des journaux & télévisions officiels — mais comment nous étonner, alors que la plus médiatique liste anti-sioniste brille par son absence dans ces mêmes médias — ce sont donc aux membres de cette sensibilité de tirer les conclusions qui s'imposent. Sur ce point d'ailleurs, la division en branches, sous-branches, courants, sous-courants, etc. de notre famille politique peut nous être utile pour faire un bilan : tous les royalistes n'ayant pas soutenu l'AR, ceux qui se gaussent auront un avis qui ne sera sans doute pas objectif, mais aura au moins le mérite de contrebalancer les opinions trop optimistes de certains adhérents AR trop prompts à l'enthousiasme. Votre humble & dévoué serviteur n'a pas fait mystère de son modeste soutien à l'AR. Bien sûr, le conseil du prince était un blog bien trop jeune pour être suivi, mais cela aura au moins permis de situé politiquement son contributeur.

Ce bilan, au vu des résultats sera mitigé. On ne peut en effet être optimiste, mais être pessimiste serait excessif. D'abord, examinons les chiffres de cette année : selon le ministère de l'intérieur, 4244 électeurs ont porté leurs voix sur la liste royaliste. En comparaison des autres formations politiques, cela pourrait relever de la blague, et sans doute, les agents du ministère de l'intérieur, en compilant les données sur ces élections ont bien railler de piètres performances — cadeau de consolation, il y avait bien d'autres listes aussi farfelues que la notre, ayant fourni les mêmes résultats. Mais voilà, il faut comparer cela avec le nombre de militants actifs. Ceux-ci doivent se compter tout au plus à 500, en réunissant tous les mouvements, toutes les manières de militer — don, tractage, affichage, rédaction d'articles, distribution de journaux, cotisation, venue à des conférences, etc. Ainsi, nous pouvons estimer que chaque militant « actif » a réussi à toucher 8 « passifs ». C'est déjà assez conséquent. Surtout quand on sait que voter AR signifiait au préalable avoir fait la démarche de s'informer sur ce parti, d'avoir consulter son site internet et avoir par ce biais téléchargé, imprimé & découpé son bulletin au préalable. Voter royaliste lors de ces élections, c'était donc véritablement commettre un acte militant, réfléchi — pas forcément, comme certains l'ont signalé, pour espérer porter l'AR au Parlement européen, mais au moins pour faire entendre sa voix. De ce point de vue, nous pouvons raisonnablement compter chaque électeur comme un militant actif, la frange du noyau dur monarchiste en France. Ceci laisse un bon espoir de développer cette base, & d'attirer, à l'avenir, des électeurs moins formés idéologiquement mais sensibles à nos idées. Pour cela, bien sûr, il convient de s'affranchir des obstacles matériels de cette campagne : 1 — La difficulté à trouver des femmes acceptant d'inscrire leur nom sur les listes ; 2 — Le retard avec lesquelles celles-ci ont été déposées ; 3 — L'absence de professions de foi adressées à chaque électeur via l'enveloppe que chacun a reçu, avec toutes les autres ; 4 — L'absence de bulletins sur les tables des mairies, le jour même du vote. Un point positif, dans cette campagne, est l'importance qu'a accordé l'AR aux médias « de masse » (télévision, journaux, etc.) Ce fut en quelque sorte la priorité de la direction de l'AR que d'obtenir un spot télévisuel, pour toucher le maximum de gens, & l'on a pu compter sur les efforts de quelques personnes pour arracher à des journaux de menus articles sur ce petit parti, royaliste & atypique.


Maintenant, comparé aux résultats de 2004, ce cru 2009 n'est pas fameux : à cette époque, l'AR recueillait 5248 voix. C'est, clairement, moins bon de 1000 voix — à 4 près. A priori, on pourrait être déçu : le militantisme a fait rage cette fois-ci, le terrain a été couvert, l'espace occupé, la place assiégée, dans la mesure de nos moyens. Mais, regardons seulement ce fait-là : cette année, il n'y avait que cinq listes — le Nord & le Sud-Ouest manquaient à l'appel — tandis qu'au dernier scrutin, Tout le territoire français était couvert. Il est peu vraisemblable que, si ces deux listes manquantes avaient été validées, leur résultats n'eut pas été supérieur à 1000 voix*. Ces 4000 & quelques voix sont donc une bonne nouvelle : dans les régions concernées, on peut admettre une progression ; mais ces voix sont aussi une mauvaise nouvelle : les deux listes manquantes ont privé le parti du Roy de précieuses voix. Car il n'en fallait finalement pas beaucoup pour transformer des résultats médiocres en succès mérité : une augmentation de quelques centaines de voix, et l'on pouvait annoncer une progression de nos idées. Bien sûr, encore une fois, un tel commentaire aurait été en décalage avec les scores des grands parties de gouvernement, mais enfin, nous ne jouons pas dans la même cour... Ce score donc, démontre un amateurisme de jeunesse. C'est encore acceptable aujourd'hui, ce ne le sera plus la prochaine fois. Ce constat pourra être dur à entendre pour les gens qui se sont investi à fond dans la campagne, j'en conviens, mais il faut savoir dépasser ses erreurs, pour ne plus les commettre.

Attardons-nous sur la campagne elle-même. Sur ce plan-là, le bilan est plutôt positif. Votre humble & dévoué serviteur manque de comparaison — trop jeune en 2004, pour s'intéresser à ces affaires — mais force est de constater que l'effort militant était au rendez-vous. De nombreuses affiches ont été collées, partout en France, des autocollants aussi, bref, tout ce que le mouvement royco comptait d'éléments motivés a été mis en branle. D'une manière plus personnelle, L'AR a d'ailleurs bien vécu le départ « à la retraite » d'Yves-Marie Adeline, ce qui n'était pas donné.

Les conclusions peuvent donc être les suivantes :
- Ne surtout pas rester fixé sur ces résultats : qu'on les prennent bien ou mal, après la réunion annoncée par la direction du parti, qu'on en parle plus & que l'AR se focalise sur les prochaines élections — régionales.
- S'occuper au plus tôt de ces prochaines échéances. Le travail pour celles-ci devrait presque être déjà entamé.
- Tenter de rallier des personnes d'expériences, pour contrer les erreurs actuelles — les bruits courent que l'AR avait réussi à embaucher un ancien maire de Montfermeil ; pourvu que celui-ci ne soit pas déçu & reste chez nous, sans être attiré par le mirage du magot électoral des grands partis...
- Constituer un réseau d'implantations locales — JP Chauvin est grand partisan de cette idée, il en reparlera sans doute — pour servir de relai aux initiatives nationales
- Organiser la réforme du royalisme tout entier, & de ses structures — cette fois, l'idée est empruntée à Catonéo, tenant l'excellent blog Royal-Artillerie — pour éviter de se tirer dans les pattes à chaque occasion. Les assises du royalisme sont là pour régler ce problème, espérons qu'elles y parviennent.
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* Votre humble & dévoué serviteur tente de trouver les chiffres de l'année 2004 pour ces régions, afin de confirmer ses dires.

lundi 1 juin 2009

La ligne de fracture française




Une petite révolution silencieuse est en train de se mettre en place dans les milieux politiques extrêmes, en France, que ce soit à droite ou à gauche. Et même, on peut repérer un début de contagion aux franges classiques & centrales du spectre politique.

Cela fait bien longtemps que la classification des partis en droite & gauche n'a plus lieu d'être. Bien sûr il reste quelques réflexes dont il est encore difficile à se débarrasser, comme de tenter toujours de mettre un mouvement, une idée, une mesure dans l'un ou l'autre côté, et déterminer ensuite le degré de fermeté, pour établir si la mesure est plutôt d'extrême(-droite/-gauche) ou de centre(droit/-gauche).

Désormais, tous les partis peuvent gouverner en prenant des mesures qui ne sont pas de leur bord. C'est le cas avec la droite, qui est au pouvoir depuis 2002, qui a pris de nombreuses décisions pouvant être considérées de gauche. D'ailleurs, nombre de gens considèrent Jacques Chirac comme un homme foncièrement de gauche — comme François Mitterrand était considéré aussi parfois comme un homme de droite. Cela a continué avec Nicolas Sarkozy qui, avec sa politique d'ouverture et son « progressisme », a brouillé définitivement le jeu — faisant perdre tous ses moyens au principal parti d'opposition, le PS. Alors, finalement, quel pourrait-être le nouveau critère de distinction politique en France ?

La réponse nous vient des extrêmes. Ceux-ci se focalisent finalement sur un seul fait : La situation au Proche-Orient, et particulièrement en Palestine-Israël. Par héritage révolutionnaire des années 70-80, toute l'extrême-gauche ou à peu près soutien la cause palestinienne. De ce fait, Tout ce qui s'approche d'un juif est leur ennemi. L'antisémitisme dans cette frange est latent et ne se dévoile pas dans l'unique but de ne pas tomber sous le coup de la loi. Alors ces gens se sont trouvé un dérivatif : l'anti-sionisme. Ce courant est apparu au cours de l'actualité la plus récente, et son origine ne remonte pas beaucoup plus loin que trois ans. Ainsi, toutes les manifestations soi-disant pour la paix au Proche-Orient ont été émaillées de slogans antisémites, sous couvert de condamner la politique d'Israël. La vérité c'est que, dans cette affaire, l'extrême gauche est épaulée — ou n'est-ce pas le contraire ? — par toute la population immigrée d'origine musulmane. On sais depuis longtemps la rivalité qui oppose les deux religions juive & musulmane.

L'extrême-droite est un peu plus partagée : d'une côté, elle est héritière d'un antisémitisme « historique », qui lui fait rejeter en même temps les francs-maçons, la grande finance internationale et les juifs qui seraient aux commandes — avec les protestants parfois — de ces deux ensembles. Mais cette opinion est complété par le même nouvel antisémitisme qui habite l'extrême gauche : une partie de la population immigrée d'origine arabo-musulmane n'a en effet pas été atteinte par le discours officiel qui faisait de l'extrême-droite, & en particulier du FN, son ennemi, et ne retenait que les sorties de son président contre les juifs. Alain Soral ou Dieudonné M'bala M'bala sont les deux exemples criant de cette nouvelle extrême droit qui n'a finalement de droite que le nom. Mais, d'une manière générale, on peu trouver des racines plus anciennes — Le GUD a eu comme slogan, il y a déjà des dizaines d'années : « A Paris comme à Gaza, Intifada ».

Finalement, qui soutient les juifs ? A l'extrême-gauche, peu de monde : seul le souvenir de l'éducation républicaine et de la sacro-sainte immunité juive — « on ne doit pas toucher à la Shoah & aux chambres à gaz » — retient un petit nombre de cracher sur ces gens. C'est la gauche traditionnelle & intellectuelle plus classique qui soutient la cause Israélienne et juive. Et pour cause, de nombreux intellectuels de confession juive sont assez médiatiquement exposés pour servir de relai par leurs discours. Bernard-Henri Lévy est l'un des premiers d'entre eux.

Le phénomène le plus intéressant se situe à droite. Face à Jean-Marie Le Pen et à son FN encore tout-puissant, Philippe de Villier a développé lui aussi une stratégie communautaire, en s'attaquant particulièrement à l'immigration musulmane, ce que justement le FN abandonnait progressivement — leur argument étant que la population immigrée est aussi victime de la politique migratoire. Ce sont donc les prémices d'une confrontation aux allures confessionnelles. Se sont engouffrés dans la brêche villiériste un petit nombre d'intellectuels juifs, d'une opinion assez conservatrice qui ont donc repris ce discours hostile à l'immigration, en le mâtinant d'un rejet arabe dû à leur religion. Eric Zemmour & Elisabeth Lévy en sont deux bons exemples.

Ainsi, la nouvelle démarcation politique française dans les extrêmes n'est plus tant politique que religieuse & est conditionnée, d'une manière paradoxale, par la situation internationale & la politique étrangère de la France. Les acteurs de cette nouvelle scène politique ne sont finalement plus les français tels que nous les voyons représentés classiquement : le quarantenaire en marcel, portant béret, litron de vin & baguette — les français de souche, en somme. Ces acteurs sont les descendants ou les membres de la population immigrée qui s'est installée en France depuis 40 ou 50 ans : maghrébins, africains, pieds noirs, harkis, bref, les régions de l'ancien empire colonial.


Ce phénomène est très mauvais pour la France. On voit des bandes de jeunes rôder pour en découdre entre « sales feujs » & « sales rebeux » — à ce titre, on constate la vision éculée de certain sur les crimes racistes & antisémites : en voir le fait principal de brutes néonazis & avinées ne correspond plus du tout à la nouvelle carte communautaire française : plus besoin des « fachos » pour agresser les juifs et les arabes, puisqu'ils se débrouillent très bien entre eux.

Ensuite, on tombe dans une surenchère communautaire entre les différentes associations de défense des minorités. D'un côté on défend les juifs et le souvenir de la Shoah, de l'autre les arabes et les discriminations sur la couleur de la peau. Paralysé entre ces deux camps, le français de souche est pris entre deux feux & doit choisir, entre critiquer la population immigrée arabo-musulmane qui lui ferait subir des violences dans son quartier, et la machine financière juive qui lui ferait perdre son emploi.

C'est cela, la nouvelle ligne de fracture française. C'est cela qu'il faut éviter à tout pris. L'importation du conflit israélo-palestinien en France est l'une des pires choses qui soit arrivée à ce pays, et nos gouvernants devraient tout faire pour l'éviter. Làs, ils sont eux-même engagés dans ce conflit, puisque défenseurs de leur électorat respectif. J'en viens donc à la conclusion qu'il ne se trouve guère de solution à ce problème, autre qu'un arbitre qui resterait impartial & ferme envers chaque camp. La rectitude est ici primordiale, & des mesures strictes sont les seuls espoirs de sortir de l'impasse. Cet arbitre, pour se trouver au dessus de cette lutte, ne peut-être élu — car alors, l'intérêt de la France serait subordonnée à l'intérêt des électeurs. Cet arbitre en un mot, c'est un roy.